2 – Accès à la formation et aux stages
Comme dans bien des sociétés développées, la formation est devenue au Québec une clé importante pour accéder au marché du travail.
En premier lieu, il est donc pertinent d’examiner l’accès des personnes handicapées à tous les ordres d’enseignement. Or, tel qu’évoqué dans l’enjeu précédent, il est difficile de brosser un portrait global de la présence des élèves et étudiants handicapés dans le réseau de l’éducation. La complexité d’un tel exercice s’explique notamment par le fait :
- Que certains élèves ou étudiants (dont le handicap n’est pas immédiatement visible) ne souhaitent pas s’identifier comme personne handicapée. Le handicap peut aussi ne pas être dévoilé à l’entrée, mais plus tard, qu’en cours de formation;
- Qu’à certains niveaux, des diagnostics médicaux sont exigés et qu’à d’autres niveaux, pas.17
Dresser un tel portrait s’avère pourtant nécessaire pour juger de la représentation ou pas, notamment dans les programmes de formation professionnelle et de formation technique (plus généralement dans les « programmes d’avenir » à tous les ordres d’enseignement) qui ont l’intérêt d’offrir des formations qualifiantes pouvant conduire directement et rapidement au marché du travail. Enfin, les statistiques relatives à la persévérance scolaire de ces élèves seraient aussi importantes à considérer. 18
Si la classe peut constituer un « avant-goût » du milieu de travail dans certains cas19, le stage en cours ou en fin de formation l’apparaît davantage. D’autant plus que pour de plus en plus d’employeurs, c’est l’occasion de repérer une relève potentielle. Aux dires des Services spécialisés de main-d’œuvre- Personnes handicapées (SSMO-PH) qui sont sollicités par les établissements d’enseignement, l’accès à de tels stages semble plus difficile pour les élèves et étudiants handicapés. Il y aura donc lieu d’analyser plus particulièrement les raisons d’une telle difficulté et comment les différents acteurs peuvent travailler ensemble à la lever.
Si l’on examine maintenant la participation des personnes handicapées à la formation (et éventuellement aux stages) avec une visée d’emploi, d’autres questions devront être soulevées:
- En amont de l’entrée en formation, peut-il y avoir des enjeux d’information scolaire et d’orientation professionnelle liés à une dissonance possible entre le programme choisi et la capacité de la personne (comprend aussi l’environnement) à exercer le ou les métiers au(x)quel(s) il prépare20? Là aussi, cela peut-il poser un défi de collaboration entre Services spécialisés de main d’œuvre- Personnes handicapées (SSMO-PH) et établissements d’enseignement?
- Étant donné les exigences des employeurs, que fait-on avec les personnes handicapées qui sortent du système scolaire sans diplôme d’études secondaires (DES) ou à la limite, avec juste un DES21? Au-delà de l’école et dans une perspective de formation tout au long de la vie, quels sont les lieux et les moyens dont disposent les personnes handicapées peu scolarisées pour continuer à développer leurs compétences? Ceux existants (notamment dans les milieux de travail) leur sont-ils accessibles? D’une manière plus générale, les personnes handicapées étudient-elles dans des programmes qui les positionnent bien pour exercer des métiers d’avenir?
En résumé, les enjeux d’accès à la formation pour les personnes handicapées sont loin de se réduire à la formation initiale et de s’arrêter aux portes de l’école.
NB : Le Mémoire déposé en juin 2023 dans le cadre de la consultation publique pour l’élaboration d’un 4ème Plan gouvernemental de lutte contre la pauvreté (PLP4) fait de l’accès équitable à l’éducation un des trois enjeux majeurs permettant de lutter contre la pauvreté des PSH.
La récente Revue de littérature met à jour cet enjeu en ce qui a trait à l’accès à la formation initiale, introduisant également des compléments sur la transition secondaire-postsecondaire.
Général
- Grande importance de la transition secondaire-postsecondaire pour les jeunes ayant des incapacités.
- Certains obstacles persistent : 1) absence de lois encadrant sa mise en œuvre, 2) manque de connaissances et d’implication des familles dans le développement des plans d’interventions, 3) opérationnalisation parfois incohérente ou inégale d’un établissement scolaire à l’autre, 4) manque de temps et de connaissances des personnes professionnelles.
- Une transition secondaire-postsecondaire difficile peut conduire à de l’isolement social, une participation sociale réduite et une exclusion du marché du travail.
Une transition secondaire-postsecondaire réussie
- Doit commencer tôt.
- Plusieurs facilitateurs existent : 1) la collaboration, la communication et les relations avec les personnes étudiantes, les parents, le personnel scolaire, les responsables gouvernementaux et la communauté, 2) les connaissances, les expériences et les formations disponibles, 3) les rencontres visant à évaluer et réévaluer les plans d’intervention des personnes étudiantes, 4) la présence d’une personne coordonnatrice attitrée à la mise en œuvre et au suivi des transitions secondaire-postsecondaire.
Programme de soutien à la transition postsecondaire
Plusieurs formules existent :
- 1) programmes adaptés offerts dans les écoles secondaires ou les établissements postsecondaires,
- 2) programmes en ligne proposant des apprentissages et des rencontres de groupes autogérés,
- 3) programmes immersifs permettant de vivre sur le campus pendant une période allant d’une journée à dix semaines et de réaliser des rencontres individuelles ou de groupe avec des personnes professionnelles et des mentors,
- 4) programmes de mentorat avec des personnes étudiantes graduées,
- 5) programmes de simulation déployés dans des centres de réadaptation,
- 6) programmes autogérés permettant de rencontrer d’autres jeunes,
- 7) programmes utilisant la technologie Webtrek,
- 8) programmes multi-composites comprenant l’établissement de relations avec l’établissement postsecondaire, la réalisation d’un plan de transition secondaire-postsecondaire, la réalisation de demandes d’admission, des références vers des professionnel. le.s ou des services spécialisés, un soutien émotionnel et de la remédiation familiale.
Fréquentation et état de situation
- Augmentation croissante du nombre de personnes ayant des incapacités dans les établissements postsecondaires.22
- Entre 18 et 34% des personnes canadiennes étudiant dans les établissements postsecondaires auraient des incapacités.23
- Seulement 14% des personnes canadiennes ayant des incapacités de 25-64 ans ont un baccalauréat, comparativement à 27% pour les autres.24
- Plus faible présence des personnes ayant des incapacités intellectuelles ou neurodéveloppementales.25
Initiatives et solutions visant l’inclusivité des études postsecondaires
Plusieurs initiatives existent :
- 1) programmes d’éducation spécialisée favorisant leur autonomie, leur littéracie, leur numératie et l’utilisation des technologies de l’information et de la communication et
- 2) occasions de participer aux activités éducatives et à la vie étudiante avec le soutien d’une personne facilitatrice.
Plusieurs solutions existent :
- 1) valorisation de la conception universelle et du développement d’environnements d’apprentissage individualisés,
- 2) offrir des accommodements basés sur des besoins et non suite à un processus d’évaluation du fonctionnement,
- 3) multiplier les moyens par lesquels elles peuvent en venir à les fréquenter et y acquérir une foule de connaissances ou d’expériences et
- 4) s’interroger quant aux manières par lesquelles certaines cultures et exigences disciplinaires contribuent à la reproduction des préjugés et augmentent les obstacles et les situations de handicap.
Stages et apprentissages intégrés au travail
- Grande importance des stages et des apprentissages intégrés au travail en raison des difficultés à trouver une première expérience de travail.
- Moins grands accès aux stages et apprentissages intégrés au travail que les autres, tout particulièrement dans le champ de la santé en raison d’un environnement inaccessible et des résistances liées à la mise en place d’accommodements
Plusieurs solutions existent :
- 1) mettre en place des programmes visant à offrir des incitatifs financiers aux employeurs,
- 2) veiller à ce que les services de soutien aux personnes étudiantes ayant des incapacités s’assurent qu’elles puissent accéder, aux accommodements dont elles ont besoin et
- 3) flexibiliser les conditions de participation (temps partiel, nombre d’heures à réaliser, etc.).
Voir aussi L’enjeu #2 en une page